Une vente aux enchères à 1,5 million d'euros pour un tableau de Soulages
Une vente aux enchères a eu lieu à Caen (Calvados) le samedi 23 janvier durant laquelle un tableau de Pierre Soulages ayant appartenu à Senghor s’est vendu à prix d’or
Reproduction du tableau de Soulages à la vente aux enchères © Esteban Pinel
C’est un tableau rempli d’histoire que les commissaires-priseurs Solène Lainé et Jean Rivola présentaient aux enchères le samedi 23 janvier à Caen. Estimé entre 800 000 et 1 million d’euros, le tableau à fait grimper le marteau jusqu’à 1,21 million d’euros (1,48 million avec les frais). L’œuvre a été acquise par un « acheteur Européen » selon Caen Enchères.
Une oeuvre historique
Le tableau s’intitule « Peinture 81 x 60 cm, 3 décembre 1956 ». Pierre Soulages a toujours nommé ses œuvres par leur dimension et leur date. Cette huile sur toile est composée de larges bandes noires rectangulaires rappelant un totem asymétrique, sur un fond jaune, approchant le doré. « Chacun y lit ce qu’il veut, un idéogramme, un homme debout, un christ ou un totem », commente Agnès Sevestre-Barbé, experte de la vente.
Pierre Soulages a peint cette toile en 1956 en France lorsqu’il était âgé de 37 ans. L’artiste, peintre du noir, jouit d’une notoriété internationale puisqu’il a été plébiscité en Allemagne et aux États-Unis où ses œuvres habillent les murs de musées de renom tel que le Museum of Modern Art de New York.
Le bijou de Léopold Sédar Senghor
La toile a longtemps appartenu à Léopold Sédar Senghor, poète et ancien président de la République du Sénégal (1960 à 1980). Très proche de Soulages, Senghor avait acquis cette œuvre à l’atelier de son ami artiste en 1956.
En épousant Colette Hubert, originaire de la région, en 1957, Léopold Sédar Senghor a cultivé des liens avec le Calvados, jusqu’à s’installer à Verson près de Caen au début des années 1980. L’œuvre avait une place particulière dans la demeure de la famille puisqu’elle était affichée dans le bureau de Senghor « Il avait réaménagé son bureau et avait affiché le tableau de telle sorte que ce soit la première chose que l’on voie en entrant. » raconte la commissaire-priseur. Fruit d’un coup de foudre cette toile n’a jamais quitté l’ex-président jusqu’à son décès en 2001. Sa femme, Colette, en hérita, avant de le léguer elle-même à sa sœur à son décès, en 2019.
Pierre Soulages et Léopold Sédar Senghor à l’inauguration de l’exposition « Pierre Soulages » au Musée Dynamique de Dakar en 1974 © Marion Bellal
Un record pour Caen Enchères
Le 23 janvier le tableau a été mis à prix à 600 000 d’euros. L’œuvre originale n’était pas visible par tout le monde et une reproduction photographique était mise à disposition pour le public. À cause de la crise sanitaire les ventes aux enchères ne se sont pas déroulées comme habituellement mais c’est par téléphone que les acquéreurs potentiels pouvaient faire grimper la mise.
Au bout de 5 minutes, le verdict tombe : le tableau est adjugé au prix de 1 210 000 d’euros. C’est un record inattendu pour Caen enchères, petite société, dont le précédent record atteignait les 273 000 d’euros pour un bronze de Claudel. Jean Rivola, commissaire-priseur affirme à l’issue de la vente « C’est un très beau prix de niveau international, la bataille s’est jouée entre sept enchérisseurs, tant professionnels que collectionneurs privés, qui le voulaient vraiment.»